Le Front national n’a remporté aucune région à l’issue du second tour des élections régionales de ce dimanche 13 décembre, mais jamais la formation d’extrême droite n’a eu autant d’élus régionaux et jamais son influence sur la République n’a été aussi pressante.
La mobilisation sans faille des électeurs de gauche du premier tour, mais aussi celle des artistes, ou de médias comme La Voix du Nord qui ont courageusement pris position a permis d’endiguer en partie le vote FN qui n’est pas parvenu à l’emporter dans des régions où il était pourtant favori comme le Nord-Pas-de-Calais-Picardie.
Les partis du Front de Gauche disparaissent purement et simplement des conseils régionaux de plusieurs grandes régions et le Front de Gauche perd de nombreux élus. La coalition de la gauche antilibérale, divisée lors de ces élections est aujourd’hui en état de mort clinique.
Jean-Luc Mélenchon a le mérite de la cohérence. Fort de ses 11 % obtenus à l’élection présidentielle de 2012, l’ancien président du PG plaide pour une stratégie décidée nationalement d’opposition frontale du camp antilibéral au camp de François Hollande et de Manuel Valls, un camp qui n’est plus social-démocrate, mais social-libéral autoritaire et qui serait en voie de « pasokisation » ; cette stratégie d’opposition frontale aurait dû être déclinée à tous les échelons, des présidentielles aux municipales. Pour Jean-Luc Mélenchon, le refus de suivre sa stratégie est créateur de confusion et de démobilisation des électeurs de la gauche antilibérale.
C’est le Parti communiste qui porterait la responsabilité de cette confusion, pour avoir plaidé aux municipales et aux départementales pour des choix effectués localement en fonction du contexte local qui autorisaient la poursuite ou la mise en place d’alliances d’union de la gauche soit parce que ces listes d’union fonctionnaient dans les municipalités ou qu’elles étaient jugées nécessaires pour battre la droite et l’extrême droite.
Pourtant, Jean-Luc Mélenchon ne propose rien d’autre qu’une stérilisation du camp antilibéral. Lors des élections régionales, les listes FDG-EELV à tête de liste écologiste n’ont pas eu le succès escompté. Quand bien même y aurait-il eu des listes d’union FDG-EELV partout en France sur la ligne d’opposition frontale et de refus de toute alliance de second tour avec le reste de la gauche, quand bien même ces listes auraient obtenu 15 % des voix, à quoi auraient servi les voix qui se seraient portées sur les listes antilibérales ?
La fracturation de la gauche conduit mécaniquement le Parti socialiste dans les bras du MoDem et de l’UDI pour le plus grand bonheur de tous ceux qui rêvent d’une recomposition politique et de la transformation du PS en parti démocrate pro-capitaliste à l’américaine.
Face au défi posé par l’extrême droite qui remporte plus de 60 % des voix dans une commune ouvrière comme Hénin-Beaumont, l’heure n’est pas à la division, mais à la bataille idéologique.
Dans les universités, militants socialistes, communistes et écologistes se retrouvent dans les mêmes syndicats étudiants. Dans la vie active, les militants de gauche se côtoient parfois dans les mêmes syndicats, dans les mêmes associations.
Au moment de l’affaire Dreyfus puis plus tard du Front populaire, la Ligue des Droits de l’Homme était une de ces associations-creuset de la gauche. Socialistes et radicaux y militaient côte à côte contre les ligues nationalistes. Face au poison raciste et aux renoncements du gouvernement à tenir une ligne humaniste et de progrès social, c’est aux militants, à la base, de s’investir pour faire bouger les choses.
Dans la situation actuelle, nous n’avons pas besoin de plus de divisions, mais de rassemblement pour mener ensemble la bataille idéologique et reconquérir les esprits : immigration, insécurité, assistanat… les mots et les thèmes de l’extrême droite sont dans les têtes. L’idée qu’il n’y a pas d’alternative possible au libéralisme a gagné les consciences des travailleurs qui se résignent.
C’est tous ensemble, qu’il faut mener la bataille des idées ; elle concerne tous les militants de gauche. Indépendamment de la vie des partis, faisons vivre la gauche comme une réalité vivante dans nos territoires. Ce travail collectif permettra en même temps de balayer les critiques récurrentes de l’extrême droite qui se pose en parti seul contre tous face à des alliances de circonstance hétéroclites.
Faisons vivre la gauche au quotidien pour qu’au moment des élections, les citoyens votent non pas pour un front républicain défensif, mais pour un projet progressiste qui les enthousiasme.
A l’intérieur de la gauche, le Parti communiste a des choses à dire. Jour après jour, les analyses de Marx se vérifient. La lutte des classes est une réalité que subissent les travailleurs comme les chômeurs. Trop souvent, le Parti communiste a été « contre l’austérité » ; au lieu d’être « contre », il faut être « pour » : pour les 32h sur lesquelles la CGT mène actuellement la bataille toute seule, pour le SMIC à 1 500 € net, pour l’augmentation des salaires et des pensions, pour les nationalisations et l’interdiction des licenciements, pour la retraite à 60 ans. Ces propositions, le PCF doit les exprimer avec simplicité et pas seulement au moment des élections, mais au quotidien, au plus près des gens, dans les quartiers et les entreprises. Une campagne de renforcement doit être lancée le plus tôt possible avec des objectifs en termes d’adhésions, mais aussi de créations de cellules de quartier et de cellules d’entreprises.
1936, 1945, 1981… A chaque fois que la gauche rassemblée avec le PCF a été au pouvoir, portée par une puissante dynamique unitaire, les réformes ont été possibles et les travailleurs ont obtenu de nouveaux droits.
Nous ne sommes plus en 1936, mais à bien des égards, la situation est pire… En 1934, les ligues nationalistes qui ont tenté le coup de force du 6 février restaient des organisations marginales. Le Front national postfasciste est aujourd’hui aux portes du pouvoir.
C’est la raison pour laquelle nous devons être à la hauteur du défi historique qui se pose à nous : en refusant la fracturation stérile de la gauche, en redevenant le parti révolutionnaire qui parle clairement et avance des propositions justes et en engageant notre parti dans une dynamique unitaire à la base pour recréer du collectif, recréer de la mobilisation et faire échec aux tentatives de recomposition libérale-autoritaire de Valls, Macron et consorts.
En avant, pour un Front populaire du XXIe siècle !