
Il faut en effet évoquer « les » plans, car il y en a plusieurs. Nicolas Sarkozy a multiplié les annonces : plan de soutien aux banques, plan d’ensemble visant particulièrement à relancer l’investissement, plan pour l’emploi des jeunes, plan de soutien à l’automobile, fonds de modernisation des équipementiers automobiles…
Il est question aussi d’un plan d’aide aux entreprises de décolletage et d’un autre pour la filière bois… À cela s’ajoutent le fonds d’investissement stratégique, le fonds d’investissement social et des mesures concernant le chômage partiel ou les dispositifs d’accompagnement des plans de licenciement.
Il y a là sans doute, pour une part, une volonté de faire illusion, de convaincre que l’on peut dompter le taureau de la crise. C’est certainement aussi, du côté des dominants, l’expression d’un désarroi face à l’inédit de la crise. Il n’y a pas que cela. Il y a probablement une prise de conscience partielle et contradictoire que dans une crise de cette nature, à une époque comme la nôtre, marquée par les bouleversements de la révolution informationnelle, on ne peut pas s’y prendre tout à fait comme avant, avec un bon gros plan où l’on coule du béton, même s’il faut le faire aussi.
Il s’agit d’être au plus près des réalités humaines. Si la société de la connaissance que l’on nous annonce ne peut s’épanouir qu’avec le développement des hommes et de leurs savoirs, il faut bien aller là où ils sont. D’ailleurs, l’Élysée, Matignon nomment des médiateurs du crédit, des commissaires à la réindustrialisation qui sont expédiés dans les bassins d’emploi sinistrés, les ministères somment les services de l’État d’aller voir en bas comment cela se passe, si l’argent parvient bien à ceux que l’on souhaite aider. On essaie, non sans arrière-pensée, d’associer les syndicats au projet.
Malgré cela, le bât blesse. Pour deux raisons au moins. D’abord, parce que l’on n’associe que pour intégrer, pas pour prendre un avis. On ne reconnaît pas aux salariés et à leurs représentants la possibilité de soumettre leurs propres propositions, par exemple, le droit de suspendre un plan de licenciements afin d’examiner d’autres solutions éventuelles. Ensuite, et surtout, parce que l’on pense que pour surmonter la crise, il faut avant tout restaurer la rentabilité financière des groupes. Sait-on qui pilote le fonds de modernisation des équipementiers automobile ? L’État et les deux constructeurs automobiles, PSA et Renault. Avec pareille équipe, le Pôle emploi – l’ANPE d’aujourd’hui – va avoir du travail.
Tous ceux qui, dans le mouvement social, parmi les forces de progrès, veulent combattre la crise et le chômage ont ainsi intérêt à interpeller « en bas » les préfets, les commissaires, les dirigeants des fonds afin de réclamer que l’argent issu de leurs impôts ou de leur travail serve à relancer vraiment l’emploi, la formation, plutôt que les profits des caïds du CAC 40.